Ollioules | Église Saint-Laurent
Pendant toute la période de l’Avent, jusqu’à Noël, le festival Sacrée Musique! fait étape dans des lieux uniques du patrimoine varois. Le long des côtes de la Méditerranée et au cœur de la Provence verte, redécouvrez l’exceptionnelle beauté de ces sites de culture et de foi et leur étonnante histoire.

Quand on descend les quelques marches qui mènent jusque dans l’église Saint-Laurent, l’atmosphère tranche avec les ruelles écrasées de soleil du centre historique d’Ollioules. De fins rayons de lumière pénètrent par les rares et étroites ouvertures. La pénombre, le silence, une douce fraîcheur… Un cadre intime où l’on éprouve un sentiment profond de calme et de paix intérieure. C’est là comme une parenthèse enchantée dans un monde où tout va trop vite et où tout est trop bruyant. Une expérience presque monastique, hors du monde et hors du temps.
Un style qui tombe à pic. Vers l’an mille, les conditions d’un renouveau sont réunies en Occident. L’arrêt des incursions scandinaves et sarrasines et la Paix de Dieu – mouvement porté par l’Église dont le but est de maîtriser l’usage de la violence dans la société, notamment entre seigneurs – entraînent une ère nouvelle de paix. La réouverture d’anciennes routes relance les échanges commerciaux et les pèlerinages. Les grands défrichements et la diffusion progressive de nouvelles techniques améliorent lentement la vie rurale et favorisent la croissance démographique. L’augmentation de la population nécessite une multiplication ou un agrandissement des lieux de culte. Un vent de réforme souffle sur le monachisme – qui revient à ses préceptes originels – et créé partout un profond renouveau spirituel. C’est dans ce contexte qu’émerge l’art roman : un style révolutionnaire qui tombe à pic alors que toute l’Europe est pris d’une ardente fièvre constructive !

Une date permet de situer l’époque originelle de la construction de l’église Saint-Laurent : 1096. L’évêque auxiliaire de Toulon, Jacques de Palme, décide de constituer le chapitre (le chapitre est composé d’un collège de clercs appelés chanoines, attachés à une cathédrale ou à une collégiale) de la cathédrale. L’église d’Ollioules est attribuée comme prébende (part de biens prélevée sur les revenus d’une église et attribuée à un clerc pour sa subsistance, en compensation du ministère accompli) au chapitre. À charge pour les chanoines désignés de s’occuper de sa construction et de son administration.
En revanche, on ne connaît pas le nom de l’architecte de la merveille.
Des génies dans l’ombre. Au Moyen Âge, les artistes demeurent anonymes. C’est la norme : quelque soit son domaine – peinture, sculpture, musique, théâtre, architecture, l’auteur s’efface devant son œuvre. Cet effacement se conçoit facilement pour un sujet religieux : manifester le divin rend dérisoire toute prétention personnelle. L’artiste médiéval conçoit son art non comme un but en soi mais comme un moyen de transmettre un message. Ainsi, dans l’ombre, sont nés et sont morts des génies anonymes. À l’heure du star-system, cela donne à méditer !

Plusieurs phases de construction
L’observation de la façade permet de repérer les différentes phases de construction. Le bâtiment initial se composait vraisemblablement d’une nef et d’un chœur en abside orienté à l’est.
Au 14e siècle, on construit un mur d’enceinte qui englobe la ville, le château et l’église, ainsi qu’un premier clocher, peut-être inclus dans la fortification et situé sous le clocher actuel.
Aux 15e et 16e siècles, l’accroissement de la communauté rend nécessaire un nouvel agrandissement de l’église. La largeur est portée à 17 mètres et on relie deux nefs latérales à la nef centrale par des arcs doubleaux. Voutées en berceaux et terminées par des absides en cul-de-four, elles s’ouvrent sur le parvis par une porte en plein cintre.
Au 17e siècle, le clocher actuel est installé et les chapelles latérales construites. L’édifice atteint alors ses dimensions définitives.
Malgré tous les ajouts et restaurations au fil des siècles, le style roman initial a été conservé. L’histoire nous lègue ainsi une église qui séduit par sa pureté et sa simplicité, et évidemment classée au titre des monuments historiques en 1982.
Les incontournables
- La statue de Notre-Dame de Bonheur du « Michel-Ange de la France »
Il est où le bonheur, il est où ? Cette Vierge baroque en marbre blanc été réalisée au 17e siècle par Pierre Puget, génial sculpteur surnommé « le Michel-Ange de la France ». Elle représente Notre-Dame de Bonheur, que l’on prie justement pour… trouver le bonheur ! On découvre l’origine de ce vocable dans l’Évangile. Quand l’ange Gabriel annonce à Marie qu’elle va enfanter le Messie qu’Israël attend, elle s’écrie : « Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur ! Il s’est penché sur son humble servante ; désormais, tous les âges me diront bienheureuse ». La Vierge Marie elle-même serait apparue à l’Ile-Bouchard accompagnée de l’ange Gabriel et aurait promis : « Je donnerai du bonheur dans les familles ». Et après tout, pourquoi ne pas essayer !

- Le fragment de chaire à prêcher avec bas-relief représentant le martyre de saint Laurent
Un saint sur le gril. Au 3e siècle, l’empereur romain Valérien reprend les persécutions contre les chrétiens. Le préfet de Rome, informé que l’Église possède des trésors, fait venir Laurent et lui enjoint de les livrer pour le besoin des troupes. Le saint se présente les poches vides mais en compagnie d’une foule de malades, d’estropiés et de sans-le-sou : « Voici les trésors de l’Église ! » Le préfet entre en fureur, le fait fouetter et mettre en prison. Là, il convertit le chef de la garde nommé Hippolyte, avant de connaître son supplice : il est fixé sur un gril, de manière à ce que les charbons à demi allumés ne consument sa chair que peu à peu. La tradition rapporte qu’il subit son martyre sans plainte, priant Dieu jusqu’à son dernier soupir. On lui prête même ces paroles lancées au bourreau : « Voici, ce côté est maintenant bien rôti ; retourne-moi, pour que l’autre cuise aussi ! » Ce qui fit de lui, plus tard, le saint patron des cuisiniers et des rôtisseurs !
- L’ange en marbre blanc de l’école de Pierre Puget
- Les fonds baptismaux provenant de l’ancien couvent des Franciscains
- Le tabernacle de style roman inspiré des coffres reliquaires du 12e siècle
Bonne visite et à bientôt pour vivre l’expérience Sacrée Musique !
